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  Âme  

 
 
 
 
 
 
 
 
Que songes-tu mon âme emprisonnée ?
 

Si nostre vie est moins qu’une journée
En l’eternel, si l’an qui faict le tour
Chasse noz jours sans espoir de retour,
Si perissable est toute chose née,

Que songes-tu mon ame emprisonnée ?
Pourquoy te plaist l’obscur de nostre jour,
Si pour voler en un plus cler sejour,
Tu as au dos l’aele bien empanée ?

Là, est le bien que tout esprit desire,
Là, le repos où tout le monde aspire,
Là, est l’amour, là, le plaisir encore.

Là, ô mon ame au plus hault ciel guidée !
Tu y pouras recongnoistre l’Idée
De la beauté, qu’en ce monde j’adore.

Si notre vie est moins qu’une journée
En l’éternel ; si l’an qui fait le tour
Chasse nos jours sans espoir de retour ;
Si périssable est toute chose née,

Que songes-tu mon âme emprisonnée ?
Pourquoi te plaît l’obscur de notre jour,
Si pour voler en un plus clair séjour,
Tu as au dos l’aile bien emplumée ?

Là, est le bien que tout esprit désire,
Là, le repos où tout le monde aspire,
Là, est l’amour, là, le plaisir encore.

Là, ô mon âme au plus haut ciel guidée !
Tu y pourras reconnnaître l’Idée
De la beauté, qu’en ce monde j’adore.
 
 
 
 
 
Comme tout inspiré, ma bouche est prisonnière de mon âme
 
« Beaucoup se sont étonnés du style affirmatif de mes écrits. Il n’existe cependant aucun autre mode qui eût pu lui être substitué, car telle est la manière d’écrire de la divination.
Pour celui qui écrit sous la dictée du surnaturel, le peut-être et le possiblement ne sont que des mots morts, l’éclair fulgurant de la divination ignorant les circonlocutions et les détours de style, son verbe étant tout de certitude et empreint de foi. Et comme le style est la bouche même de la pensée, j’ai dû obéir et me plier au gosier de ma propre Idée, ou risquer d’être frappé d’impuissance spirituelle.
Que le lecteur ne voie pas dans mon style de la forfanterie ou de la suffisance, car, comme tout inspiré, ma bouche est prisonnière de mon âme, je suis l’esclave du Verbe, de même que l’eau ne peut choisir comment elle veut couler, mais obéit à la pente et au lit du ruisseau. »
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

   
J. du Bellay (1522-1560), L’Olive, sonnet cxiii, v. 5 ; Gallimard, « Pléiade » : Anthologie de la poésie française, t. i, 2000, p. 625-626.
   
Malcolm de Chazal (1902-1981), La Vie filtrée (1949), « La littérature » ; Gallimard, « L’imaginaire », 2003, p. 210.
   
 
   
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