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Dernière édition MMIV Dé 21 - Minuit  
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  De quelle chaîne parler ? De la télévision.
       
La chaîne alimentaire.
  « Le chapitre III de L’Origine des espèces est consacré à la « lutte pour l’existence ». Charles Darwin y montre « combien sont complexes et inattendus les rapports réciproques des êtres organisés qui ont à lutter ensemble dans un même pays ». Parmi ces rapports, il cite ceux qui s’établissent entre les plantes à fleurs et les insectes qui les pollinisent. Bien entendu, n’importe quel insecte ne convient pas à n’importe quelle plante. Ainsi, Darwin rapporte qu’il a observé que le trèfle rouge (ou trèfle des prés) ne peut être fécondé que par les bourdons. Or le nombre de ces derniers « dépend dans une grande mesure du nombre des mulots qui détruisent leurs nids et leurs rayons de miel ». Étant établi que la présence des mulots dépend de celle des chats, Darwin, en se référant aux travaux d’un certain Newman « qui a longtemps étudié les habitudes du bourdon », suggère que les bourdons sont plus abondants près des villages où les chats sont plus nombreux à donner la chasse aux mulots. Et Darwin de conclure : « Il est donc parfaitement possible que la présence d’un animal félin dans une localité puisse déterminer, dans cette même localité, l’abondance de certaines fleurs en raison de l’intervention des souris et des abeilles ! » Il était tentant – certains commentateurs malicieux n’y ont pas résisté – de continuer cette chaîne en suggérant que la pousse du trèfle assurait l’abondance du cheptel bovin, laquelle permettait à la marine anglaise de nourrir sur ses navires des contingents de marins dont l’absence au pays condamnait au célibat de nombreuses Anglaises qui, reportant leur affection sur les chats, favorisaient les bourdons, qui… »
       
La recherche du « chaînon manquant » (missing link).
  « La recherche du « chaînon manquant » (missing link) a été tributaire des découvertes de fossiles humains et des théories interprétatives qui les ont accompagnées. Ce n’est qu’avec la reconnaissance de l’authenticité des outils préhistoriques découverts par Boucher de Perthes dans la vallée de la Somme et, la même année (1859), la publication de L’Origine des espèces de Darwin, que l’idée de l’évolution humaine peut se dégager du modèle biblique et d’un homme d’avant le Déluge. Néanmoins, deux conceptions s’affrontent au cours des cent années suivantes. D’une part celle d’un homme « descendant du singe » ; si c’est bien le cas, le chaînon manquant doit posséder des caractères intermédiaires entre l’un et l’autre : c’est l’homme-singe de bien des mythologies, qui survit encore dans notre moderne yeti. L’autre conception renoue, consciemment ou non, avec le modèle biblique, en recherchant un homme sauvage qui soit presque dès l’origine dégagé de l’animalité. La première idée a dominé au xixe siècle, la seconde au cours du xxe siècle. C’est au nom de la première que l’on a longtemps refusé d’admettre le caractère très moderne de l’Homme de Neandertal, dont les premières découvertes remontent à 1833, ou encore l’authenticité de l’art pariétal des grottes paléolithiques. C’est au nom de la seconde qu’a été fabriqué en 1912 (par Teilhard de Chardin, selon le paléontologue Stephen Jay Gould !) le faux « homme de Piltdown », crâne humain moderne doté d’une mandibule limée d’orang-outang, et que l’on a parfois voulu déposséder les Australopithèques de leurs outils ou les Sinanthropes de leurs foyers. Aujourd’hui, le mythe d’un homme (en l’occurrence une femme) créé de toutes pièces s’incarne dans l’hypothèse de l’Ève africaine. En même temps, l’éthologie des grands singes efface les frontières de l’humanité : les chimpanzés ne possèdent-ils pas déjà des outils et des traditions « culturelles », transmises par apprentissage et distinctes dans chaque région, pour casser des noix ou attraper des termites ? De plus, la notion d’une « chaîne des êtres » à peu près continue, et dont un chaînon pourrait manquer, a été entièrement balayée par celle d’un buissonnement évolutif dont la taille (au sens jardinier), contingente, est le fait des extinctions d’espèces. La notion de chaînon manquant aura en tout cas eu un impact important en littérature, en contribuant de façon décisive à façonner notre littérature policière. Les vrais chaînons manquants, s’ils ont déserté la paléontologie, se trouvent chez Wells (L’Île du docteur Moreau), Stevenson (Docteur Jekyll et Mister Hyde) ou Conan Doyle (Le Monde perdu). »
       
     
       
     
       
     
       
 
   
       
       

 

   
J.-M. Drouin, « Chaîne alimentaire », in Dictionnaire culturel des sciences, sous la direction de N. Witkowski, Seuil-Regard, 2001, p. 93.
   
J.-P. Demoule, « Chaînon manquant », in Dictionnaire culturel des sciences, sous la direction de N. Witkowski, Seuil-Regard, 2001, p. 93.
   

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