Dernière édition MMIV Dé 21 - Minuit |
En maison d’arrêt,
on distingue les condamnés des prévenus. Condamné à mort, à boire la cigue ou à la chaise électrique. Se dit aussi d’une porte. |
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Comme pour le taureau, nous sommes condamnés d’avance : s’il n’y a rien, je rentrerai dans le zéro d’où je sors ; s’il existe un tribunal divin, il tiendra compte des injustices du tribunal des hommes. |
« Nous sommes dans un monde pareil à une arène espagnole, en ce sens que nous sommes dupes de mille perspectives, et que ces perspectives menteuses nous conduisent jusqu’à l’estocade. Il s’agit, comme pour le taureau, de mourir noblement puisque nous sommes condamnés d’avance… Voilà quarante ans que je suis sur la brèche. Je n’ai aucune crainte de mourir. S’il n’y a rien, je rentrerai dans le zéro d’où je sors. S’il existe un tribunal divin, il tiendra compte des injustices du tribunal des hommes. » | ||
Être condamné sans être coupable est le grand honneur du poète. |
« Le culte de la vitesse ou, pour être plus exact, de la hâte, fausse tout. Le jugement rapide pousse les uns sur l’estrade de miss Europe, les autres dans la trappe du père Ubu. Mais être condamné n’est rien. C’est être coupable qui est grave. Être condamné sans être coupable est le grand honneur du poète. Il ne doit en ressentir aucune amertume. Notre route se fait à pied, en marge de la grande route, et dans l’ombre, éclaboussés de vitesses, et de lumières. Beaucoup de jeunes gens se fatiguent de cette marche. Ils se livrent à l’auto-stop. Ils montent dans une voiture qui n’est pas la leur, et s’imaginent aller vite, alors que cette vitesse ne leur appartient pas. Il est très difficile de leur faire comprendre la nécessité, pour le poète, d’une manière d’échec dans l’immédiat. Ils veulent arriver. Je me demande à quoi et où. » | ||
Être condamné n’est rien, c’est être coupable qui est grave : être condamné sans être coupable est le plus grand honneur du poète. |
« Ce n’est pas que la jeunesse travaille, aujourd’hui. C’est mieux : elle bouillonne, elle bouscule le couvercle, elle cherche à sortir d’un carrousel de noms tabous, elle redevient vraiment jeune ! Vous le savez, j’ai toujours préféré le mouvement aux écoles qui obligent un jour à s’asseoir… Cependant, le culte de la vitesse, ou, pour être plus exact, de la hâte, fausse tout. Le jugement rapide pousse les uns sur l’estrade de Miss Europe, et les autres dans la trappe du Père Ubu. Mais être condamné n’est rien : c’est être coupable qui est grave. Être condamné sans être coupable est le plus grand honneur du poète. Il ne doit en ressentir aucune amertume. Notre route se fait à pied, en marge de la grande route et dans l’ombre éclaboussée de lumières et de vitesses… Hélas ! beaucoup de jeunes gens se fatiguent de cette marche et se livrent à l’auto-stop moral. Ils montent dans une voiture qui n’est pas la leur et s’imaginent aller vite, alors que cette vitesse ne leur appartient pas. » | ||
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J. Cocteau (1889-1963), « Jean Cocteau », entretien avec Christine Garnier pour un livre sur les confidences d’écrivains, 21 mai 1954 ; in Le passé défini : journal, « Annexes », xiv, Gallimard, « NRF », t. iii, 1989, p. 352. | |
J. Cocteau (1889-1963), Le passé défini : journal, 29 janvier 1954 ; Gallimard, « NRF », t. iii, 1989, p. 32. | |
J. Cocteau (1889-1963), « Jean Cocteau », entretien avec Christine Garnier pour un livre sur les confidences d’écrivains, 21 mai 1954 ; in Le passé défini : journal, « Annexes », xiv, Gallimard, « NRF », t. iii, 1989, p. 350. | |