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Dernière édition MMV - Équinoxe du printemps  
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« Punition » : c’est le titre de la deuxième partie du livre de Michel Foucault publié en 1975. Cette section de Surveiller et punir met en évidence deux phénomènes : « la punition généralisée » et « la douceur des peines ».
       
La loi des punitions est qu’elles soient entièrement purifiées de violence.
  « Violence – C’est un genre de force, mais passionnée, et qui vise à briser la résistance par la terreur. La violence définit le crime, lorsqu’elle | s’exerce contre la personne humaine. Et la loi des punitions est au contraire qu’elles soient entièrement purifiées de violence. »
       
Il y a eu des sociétés sans prisons, il n’y a pas si longtemps : comme punition, la prison est une invention du début du xixe siècle
 

« – Une dernière question pour conclure : peut-on imaginer une société sans prisons ?
– La réponse est facile : il y a eu, en effet, des sociétés sans prisons ; il n’y a pas si longtemps. Comme punition, la prison est une invention du début du xixe siècle. Si vous regardez les textes des premiers pénalistes du xixe siècle, vous constaterez qu’ils commencent toujours leur chapitre sur les prisons en disant : « La prison est une peine nouvelle qui était encore inconnue au siècle dernier. » Et le président de l’un des premiers congrès pénitentiaires internationaux, congrès qui, si ma mémoire est bonne, eut lieu à Bruxelles, en 1847, disait : « Je suis bien vieux et je me souviens encore du temps où l’on ne punissait pas les gens par la prison, mais où l’Europe était couverte de gibets, de carcans et d’échafauds divers, où l’on voyait des gens mutilés qui avaient perdu une oreille, deux pouces ou un œil. C’étaient ça les condamnés. » Il évoquait ce paysage, à la fois visible et bariolé de la punition, et il ajouta : « Maintenant, tout cela est enfermé derrière les murs monotones de la prison. » Les gens de cette époque ont eu parfaitement conscience qu’une peine absolument nouvelle était née. Vous voulez me faire décrire une société utopique où il n’y aurait pas de prison. Le problème est de savoir si l’on peut imaginer une société dans laquelle l’application des règles serait contrôlée par les groupes eux-mêmes. C’est toute la question du pouvoir politique, le problème de la hiérarchie, de l’autorité, de l’État et des appareils d’État. C’est seulement quand on aura débroussaillé cette immense question que finalement on pourra dire : oui, on doit pouvoir punir de cette manière, ou il est tout à fait inutile de punir, ou encore, à cette conduite irrégulière, la société doit donner telle réponse. »

       
       

 

   
M. Foucault (1926-1984), Surveiller et punir : naissance de la prison (1975), II : « Punition » ; Gallimard, « Bibliothèque des histoires », 1975, p. 75-134. Pour « La punition généralisée », chap. Ier, p. 75-105 ; pour « La douceur des peines », chap. II, p. 106-134.
   
Alain (1868-1951), Définitions (publ. 1953), « Violence » ; Gallimard, « Pléiade » : Les arts et les dieux, 1958, p. 1098-1099.
   
M. Foucault (1926-1984), « Prisons et révoltes dans les prisons », entretien avec B. Morawe, juin 1973 ; Gallimard, « Quarto » : Dits et écrits, t. i, 2001, p. 1300.
   

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