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« En somme, dit Tarrou avec simplicité,
ce qui m'intéresse, c'est de savoir comment on devient saint.
- Mais vous ne croyez pas en Dieu.
- Justement. Peut-on être un saint sans Dieu, c'est le seul problème
concret que je connaisse aujourd'hui. »
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« Permettez-moi enfin un conseil de travail :
il y a toujours intérêt, dans les analyses de concept, de partir de situations
très concrètes, très simples, et non pas des antécédents philosophiques
ni même des problèmes
en tant que tels (l’un et le multiple, etc.) ; par exemple pour les
multiplicités, ce dont il faut partir, c’est : qu’est-ce qu’une meute ? (différente d’un seul animal),
qu’est-ce qu’un ossuaire ?
Ou, comme vous l’avez fait si bien, qu’est-ce qu’une relique ? Pour les événements : qu’est-ce que cinq
heures du soir ? La critique possible de la mimésis, c’est par exemple dans le rapport concret de l’homme
et de l’animal qu’il faut la saisir. Je n’ai donc qu’une chose à vous
dire : ne perdez pas le concret, revenez-y constamment. Multiplicité,
ritournelle, sensation, etc. se développent en purs | concepts, mais sont
strictement inséparables du passage d’un concret à un autre. C’est pourquoi
il faut éviter de donner à une notion quelconque un primat sur les autres :
c’est chaque notion qui doit entraîner les autres, à son tour et le moment
venu […]. Je crois que plus un philosophe est doué, plus il a tendance,
au début, à quitter le concret. Il doit s’en empêcher, mais seulement
de temps en temps, le temps de revenir à des perceptions, à des affects,
qui doivent redoubler les concepts. » |