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Dernière édition MMIV Dé 21 - Minuit
Difficulté
       
 

Un problème se présente sous la forme d’une difficulté quelconque (question difficultueuse, affaire ténébreuse ou épineuse) : résoudre un problème consiste à vaincre une difficulté.
On peut aimer vaincre sans péril, quitte à triompher sans gloire. Il est vrai que la solution la plus simple est souvent la meilleure. Gare toutefois à ne pas vaincre de travers.

       
Se battre ferme avec la difficulté.
 

« J’aimais d’autant plus les mathématiques que je méprisais davantage mes maîtres, MM. Dupuy et Chabert. Malgré l’emphase et le bon ton, l’air de noblesse et de douceur qu’avait M. Dupuy en adressant la parole à quelqu’un, j’eus assez de pénétration pour deviner qu’il était infiniment plus ignare que M. Chabert. M. Chabert qui, dans la hiérarchie sociale des bourgeois de Grenoble, se voyait tellement au-dessous de M. Dupuy, quelquefois, le dimanche ou le jeudi matin, prenait un volume d’Euler ou de [un blanc] et se battait ferme avec la difficulté. »

       
Il faut se roidir contre les difficultés, comme Thomas.
 

« Tu ne m’as pas l’air gai, mon pauvre bonhomme. Tes lettres sont de plus en plus mélancholiques et tu me parais devenir de plus en plus méchanique. C’est un tort, nom de Dieu, c’est un tort ! Il faut se roidir contre les difficultés, comme Thomas. Il n’y a peut-être que les Thomas qui se roidissent bien ?
Je commence à le croire, puisque je vois un homme tel que toi, déroidissant… Tu ne prends pas les choses en quantité raisonnable […] Et puis, sacré nom de Dieu ! que me chantes-tu avec des phrases pareilles : « Je m’effacerai ainsi du monde graduellement » ? Merde, j’ai envie de te foutre des coups de pied au cul. Que veux-tu que je devienne, misérable, si tu bronches, si tu m’ôtes ma croyance ? Tu es le seul mortel en qui j’aie foi, et tu fais tout ce que tu peux pour me desceller du cœur cette pauvre niche de marbre, placée haut, et où tu rayonnes.
Fais-mois le plaisir pour toi, et dans l’intérêt même de cet avenir dont l’idée permanente te préoccupe maintenant, exclusivement, de tâcher de t’abstraire un peu et de travailler. Tant que tu seras à te branler la cervelle sur ta personnalité, sois sûr que ta personnalité souffrira. Et d’ailleurs à quoi bon ? Si ça servait pratiquement à quelque chose, très bien. Mais au contraire, et cela est démontrable par A + B. »

 
 
   
Une immense difficulté.
 
  La Difficulté d’être est l’un des principaux ouvrages de réflexion de Jean Cocteau. La formule est empruntée aux Misérables de Victor Hugo.
    « Dans l’absurde et artificiel « Javert déraillé », Hugo emploie l’expression « difficulté d’être ». Il ne voyait dans tout cela | qu’une immense difficulté d’être. (« Javert déraillé »). »
 
 
   
La difficulté d'être est plus grande que la difficulté de vivre.
  « Le pessimisme ne peut naître que du passé, du présent ou de l’avenir. Or, comme rien de tout cela n’existe, il ne saurait y avoir ni pessimisme ni optimisme. Il n’y a que vivre. Être. La difficulté d’être étant plus grande que la difficulté de vivre. »
 
 
   
La difficulté d'être : la vaincre ou la tourner ?
  « Il y a des minutes où je pense que je n’arriverai jamais à vaincre jusqu’à la fin, la difficulté d’être. D’autres minutes où je parviens, par le travail, à ne plus être, ce qui tourne la difficulté. »
       
La difficulté vaincue ?
  « La difficulté vaincue. La plupart du temps, c’est une victoire à la Pyrrhus ! »
       
 
   
       
       

 

   
Stendhal (1783-1842), Vie de Henry Brulard (1835-1836), chap. XXXIII ; Gallimard, « Pléiade » : Œuvres intimes, t. II, 1982, p. 851.
   
G. Flaubert (1821-1880), Lettre, à Louis Bouilhet, Croisset, 27 juin 1855 ; Gallimard, « Pléiade » : Correspondance, t. ii, 1980, p. 583.
   
J. Cocteau (1889-1963), Le passé défini : journal, 23 juin 1954 ; Gallimard, « NRF », t. III, 1989, p. 149-150.
   
J. Cocteau (1889-1963), Le passé défini : journal, 2 novembre 1952 ; Gallimard, « NRF », t. I, 1983, p. 370.
   
J. Cocteau (1889-1963), Le passé défini : journal, fin octobre 1954 ; Gallimard, « NRF », t. III, 1989, p. 274.
   
P. Claudel (1868-1955), Journal, octobre 1942 ; Gallimard, « Pléiade », t. II, 1969, p. 419.
   
 
   
   
   
   
   

 

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