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« Je vote, tout en me disant
que, ce faisant, je prends souvent parti sur des problèmes biaisés et
des hommes dont je ne puis juger la valeur. Les Démocrates et les Républicains
se passent ici leurs opinions de pères en fils, si bien qu’on a parfois
l’impression qu’il s’agit de deux clans plutôt que de deux partis, et
les indépendants les meilleurs et les plus intelligents n’ont | jamais
pu se faufiler entre ces blocs. Les deux partis ont tellement changé au
cours d’un siècle qu’on ne peut plus guère parler d’un programme opposé
à un programme ; en principe tout au moins, les Démocrates sont un
peu plus libéraux que les Républicains, qui tendent à faire la politique
des grands trusts. En
pratique, comme toujours, tout dépend de l’individu en question, mais
lui-même dépend des fils qui animent bon gré mal gré les pantins politiques.
Un peu de bon, un peu de bien, un peu d’utile se fait quand même dans
cette immense pagaille. Les foules vite agitées par un incident quelconque
(le Vietnam, le Watergate, le drame des otages en Iran, par exemple) retombent
bientôt dans leur inertie ou dans le petit souci de ses affaires à soi.
Les fanatismes plus ou moins masqués, plus ou moins larvés, n’attendent
que leur moment pour reparaître tout armés (je pense par exemple à l’évidente
recrudescence des activités du « Klan ») ; les intérêts
particuliers se font passer pour des intérêts publics. Le coût des élections
et des réélections est tel que toute démocratie de ce type est en fait
une ploutocratie. La corruption est presque un sine
qua non de la politique. Mais, de quel pays parlais-je ?
Des États-Unis ? Ou d’une autre démocratie, peu importe laquelle,
ou peut-être de la Rome au temps de Marius et de Sylla ? » |