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Dernière édition MMV - Ours - Minuit
Résoudre
       
 

Les barbares prétendent solutionner (sic) le problème. Par définition, les barbares ne savent pas ce qu’ils disent. Laissons aux anglophones le soin de préciser de quel outre ou tonneau ce barbarisme nous arrive : marchandise d’outre-Atlantique, ou d’outre-Manche ?
F... ! – faisait la marquise excédée –, passons... outre : en bon françois, un problème, on se contente de le résoudre.

       
Il importe de se poser un problème préalable et d’essayer de le résoudre.
  « Peindre sans être peintre n’est pas commode. Il importe de se poser un problème préalable et d’essayer de le résoudre. De copier réalistiquement une idée abstraite de tableau. Cette idée, et ce qui en résulte, ne correspondent généralement pas avec l’idée que les autres se forment de ce que nous devrions faire et de ce qu’ils | feraient à notre place. Une solitude neuve s’ajoute à la solitude d’écrire, une des plus grandes qui soient ! »
       
Vous connaissez le mot de Marx ? L’humanité ne se pose que des problèmes qu’elle peut résoudre. Je crois qu’on peut dire : l’humanisme feint de résoudre des problèmes qu’il ne peut pas se poser
  « Les découvertes de Lévi-Strauss, de Lacan, de Dumézil appartiennent à ce qu’il est convenu d’appeler les sciences humaines ; mais ce qu’il y a de caractéristique, c’est que toutes ces recherches non seulement effacent l’image traditionnelle qu’on s’était fait de l’homme, mais à mon avis elles tendent toutes à rendre inutile, dans la recherche et dans la pensée, l’idée même de l’homme. L’héritage le plus pesant qui nous vient du xixe siècle – et dont il est grand temps de nous débarrasser –, c’est l’humanisme. […]
L’humanisme a été une manière de résoudre, dans des termes de morale, de valeurs, de réconciliation, des problèmes que l’on ne pouvait pas résoudre du tout. Vous connaissez le mot de Marx ? L’humanité ne se pose que des problèmes qu’elle peut résoudre. Je crois qu’on peut dire : l’humanisme feint de résoudre des problèmes qu’il ne peut pas se poser […]. Les problèmes des rapports de l’homme et du monde, le problème de la réalité, le problème de la création artistique, du bonheur, et toutes les obsessions qui ne méritent absolument pas d’être des problèmes théoriques… Notre système ne s’en occupe absolument pas. Notre tâche actuellement est de nous affranchir définitivement de l’humanisme, et, en ce sens, notre travail est un travail politique. […]
Sauver l’homme, redécouvrir l’homme en l’homme, etc., c’est la fin de toutes ces entreprises bavardes, à la fois théoriques et pratiques, pour réconcilier, par exemple, Marx et Teilhard de Chardin (entreprises noyées d’humanisme qui ont frappé de stérilité depuis des années tout le travail intellectuel…). Notre tâche est de nous affranchir définitivement de l’humanisme, et c’est en ce sens que notre travail est un travail politique, dans la mesure où tous les régimes de l’Est ou de l’Ouest font passer leur mauvaise marchandise sous le pavillon de l’humanisme… Nous devons dénoncer toutes ces mystifications, comme actuellement, à l’intérieur du P.C., Althusser et ses compagnons courageux luttent contre le chardino-marxisme… »
       
       

 

   
J. Cocteau (1889-1963), « Cocteau peintre », rencontre avec Jean-Albert Cartier, septembre 1954 ; in Le passé défini : journal, « Annexes », xxii, Gallimard, « NRF », t. III, 1989, p. 369-370.
   
M. Foucault (1926-1984), « Entretien avec Madeleine Chapsal », mai 1966 ; Gallimard, « Quarto » : Dits et écrits, t. i, 2001, p. 544.
   
   

 

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