Dernière édition MMV - Ours - Minuit |
Action ! Action principale, action secondaire. Dans le feu de l’action. Action et passions. |
|||
|
|||
Cet autre théâtre n’est ni fête pour son public, ni leçon, ni délassement, mais action : l’élite participe à la réalisation de la création d’un des siens, qui voit vivre en soi-même, en cette élite, l’être créé par soi, plaisir actif qui est le seul plaisir de Dieu, et dont la foule civique a la caricature dans l’acte de chair… |
« Qu’est-ce qu’une pièce de théâtre ?
Une fête civique ? Une leçon ? Un délassement ? Il semble d’abord qu’une pièce de théâtre soit une fête civique, étant un spectacle offert à des citoyens assemblés. Mais notons qu’il y a plusieurs publics du théâtre, ou tout au moins deux : l’assemblée du petit nombre des intelligents et celle du grand nombre. Pour ce grand nombre, les pièces à spectacle (spectacles de | décors et ballets, ou d’émotions visibles et accessibles, Châtelet et Gaîté, Ambigu et Opéra-Comique), qui lui sont délassement surtout, leçon peut-être un peu, parce que le souvenir en dure, mais leçon de sentimentalité fausse et d’esthétique fausse, qui sont les seules vraies pour ceux-là, à qui le théâtre du petit nombre semble incompréhensible ennui. Cet autre théâtre n’est ni fête pour son public, ni leçon, ni délassement, mais action ; l’élite participe à la réalisation de la création d’un des siens, qui voit vivre en soi-même, en cette élite, l’être créé par soi, plaisir actif qui est le seul plaisir de Dieu, et dont la foule civique a la caricature dans l’acte de chair. Même la foule jouit un peu de ce plaisir de création, toute relativité observée. » |
||
L’action de ma pièce est imagée tandis que le texte ne l’est pas… |
« L’action de ma pièce est imagée tandis que le texte ne l’est pas. J’essaie donc de substituer une poésie de théâtre à la poésie au théâtre. La poésie au théâtre est une dentelle délicate impossible à voir de loin. La poésie de théâtre serait une grosse dentelle ; une dentelle en cordages, un navire sur la mer. Les Mariés peuvent avoir l’aspect terrible d’une goutte de poésie au microscope. Les scènes s’emboîtent comme les mots d’un poème. » | ||
|
|||
A. Jarry (1873-1907), Textes relatifs à Ubu roi, « Réponses à un questionnaire sur l’art dramatique », 3 ; Gallimard, « Pléiade » : Œuvres complètes, t. i, 1972, p. 411-412. | |
J. Cocteau (1889-1963), Les mariés de la tour Eiffel : ballet satirique en un acte (1921), « Préface » (1922) ; Gallimard, « Pléiade » : Théâtre complet, 2003, p. 36. | |