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  Pièce  

         
Par « pièce », nous entendons le poème dramatique tout entier, et nous comprenons les tragédies, les comédies, les opera, même les opera comiques, sous le nom générique de pièces de théâtre.
  « Pièce, s. f. (littérature). – Dans la poésie dramatique, est le nom qu’on donne à la fable d’une tragédie ou d’une comédie, ou à l’action qu’on y représente. (Voyez « Fable » et « Action ».)
M. Chambers ajoute que ce mot se prend plus particulièrement pour signifier le nœud ou l’intrigue qui fait la difficulté et l’embarras d’un poème dramatique. Cette acception du mot pièce peut avoir lieu en Angleterre, mais elle n’est pas reçue parmi nous. Par « pièce », nous entendons le poème dramatique tout entier, et nous comprenons les tragédies, les comédies, les opera, même les opera comiques, sous le nom générique de pièces de théâtre. Depuis Corneille et Racine, nous avons peu d’excellentes pièces.
On appelle aussi pièces de poésie certains ouvrages en vers d’une médiocre longueur, telles qu’une ode, une élégie, etc. Toutes les pièces de Rousseau ne sont pas d’une égale force : les pièces fugitives qu’on insère dans le Mercure ne sont pas toujours excellentes.
La coutume s’est aussi introduite depuis quelque temps dans le langage familier, d’appeler « pièces » les ouvrages des orateurs : ainsi l’on dit que tel prédicateur a nombre de bonnes pièces ; que le panégyrique de S. Louis par l’abbé Seguy, est une des meilleures pièces qui aient paru en ce genre. »
 
         
Qu’est-ce qu’une pièce de théâtre ? Une fête civique ? Une leçon ? Un délassement ?
  « Qu’est-ce qu’une pièce de théâtre ? Une fête civique ? Une leçon ? Un délassement ?
Il semble d’abord qu’une pièce de théâtre soit une fête civique, étant un spectacle offert à des citoyens assemblés. Mais notons qu’il y a plusieurs publics du théâtre, ou tout au moins deux : l’assemblée du petit nombre des intelligents et celle du grand nombre. Pour ce grand nombre, les pièces à spectacle (spectacles de | décors et ballets, ou d’émotions visibles et accessibles, Châtelet et Gaîté, Ambigu et Opéra-Comique), qui lui sont délassement surtout, leçon peut-être un peu, parce que le souvenir en dure, mais leçon de sentimentalité fausse et d’esthétique fausse, qui sont les seules vraies pour ceux-là, à qui le théâtre du petit nombre semble incompréhensible ennui. Cet autre théâtre n’est ni fête pour son public, ni leçon, ni délassement, mais action ; l’élite participe à la réalisation de la création d’un des siens, qui voit vivre en soi-même, en cette élite, l’être créé par soi, plaisir actif qui est le seul plaisir de Dieu, et dont la foule civique a la caricature dans l’acte de chair.
Même la foule jouit un peu de ce plaisir de création, toute relativité observée. »
 
         
Il n’y a rien de si jeune que des pièces très anciennes.
  « À l’Odéon, on traduit Eschyle, comprenant que la pensée se modifiant peut-être « en anneau », il n’y a rien de si jeune que des pièces très anciennes. »  
         
 
 
     
Une pièce de théâtre, ça se regarde
  « Une pièce de théâtre, ça se regarde. L’ouïe est fonction de l’œil, et mettre en scène, c’est établir le rapport entre l’ouïe et l’œil, afin d’en éliminer la différence. La contradiction. L’acteur ne peut pas être naturel, comme n’est pas naturel tout individu regardé. »  
 
 
     
La grande adresse est de ne pas montrer toute sa perfection en une seule fois, mais seulement par pièces : il faut qu’un bel échantillon engage à montrer quelque chose qui soit encore plus beau, et que l’applaudissement donné à la première pièce fasse désirer impatiemment de voir toutes les autres…
  « L’homme d’ostentation. Ce talent donne du lustre à tous les autres. Chaque chose a son temps, et il faut épier ce temps, car chaque jour n’est pas un jour de triomphe. Il y a des gens d’un caractère particulier, en qui le peu paraît beaucoup, et que le beaucoup fait admirer. Lorsque l’excellence est jointe avec l’étalage, elle passe pour un prodige. Il y a des nations ostentatives, et l’espagnole l’est au suprême degré. La montre tient lieu de beaucoup, et donne un second être à tout, et particulièrement quand la réalité la cautionne. Le Ciel, qui donne la perfection, y joint aussi l’ostentation, car sans elle toute perfection serait dans un état violent. À l’ostentation, il faut de l’art. Les choses les plus excellentes dépendent des circonstances, et par conséquent elles ne sont pas toujours de saison. Toutes les fois que l’ostentation s’est faite à contretemps, elle a mal réussi. Rien ne souffre moins l’affectation ; et c’est toujours par cet endroit que l’ostentation échoue, parce qu’elle approche fort de la vanité, et que celle-ci est très sujette au mépris. Elle a besoin d’un grand tempérament pour ne pas donner dans le vulgaire, car son trop l’a déjà discréditée parmi les gens d’esprit. Quelquefois elle consiste dans une éloquence muette, et dans l’art de montrer la perfection comme par manière d’acquit, car une sage dissimulation est une parade plausible, cette même privation aiguillonnant plus vivement la curiosité. Sa grande adresse est de ne pas montrer toute sa perfection en une seule fois, mais seulement par pièces, et comme si l’on était après à la peindre pour en découvrir toujours davantage. Il faut qu’un bel échantillon engage à montrer quelque chose qui soit encore plus beau, et que l’applaudissement donné à la première pièce fasse désirer impatiemment de voir toutes les autres. »
 
 
 
     
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         
         

   
Diderot & d’Alembert (sous la direction de –), Encyclopédie, ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers (1751-1765), s.v. « Pièce ».
   
A. Jarry (1873-1907), Textes relatifs à Ubu roi, « Réponses à un questionnaire sur l’art dramatique », 3 ; Gallimard, « Pléiade » : Œuvres complètes, t. i, 1972, p. 411-412.
   
A. Jarry (1873-1907), Textes relatifs à Ubu roi, « Réponses à un questionnaire sur l’art dramatique », 2 ; Gallimard, « Pléiade » : Œuvres complètes, t. i, 1972, p. 411.
   
G. Perros (1923-1978), Papiers collés II (1973), « Notes » ; Gallimard, « L’imaginaire », 1989, p. 94.
   
B. Gracián (1601-1658), Oráculo manual y Arte de prudencia (1647), § 277 : Hombre de ostentación. Es el lucimiento de las prendas. Ai vez para cada una : lógrese, que no será cada día el de su triunfo. Ai sugetos vizarros en quienes lo poco luze mucho, y lo mucho hasta admirar. Quando la ostentativa se junta con la eminencia, passa por prodigio. Ai naciones ostentosas, y la Española lo es con superioridad. Fue la luz pronto lucimiento de todo lo criado. Llena mucho el ostentar, suple mucho y da un segundo ser a todo, y más quando la realidad se afiança. El Cielo, que da la perfección, previene la ostentación, que qualquiera a solas fuera violenta. Es menester arte en el ostentar : aun lo mui excelente depende de circunstancias y no tiene siempre vez. Salió mal la ostentativa quando le faltó su sazón. Ningún realçe pide ser menos afectado, y perece siempre deste desaire, porque está mui al canto de la vanidad, y ésta del desprecio. Ha de ser mui templada porque no dé en vulgar, y con los cuerdos está algo desacreditada su demasía. Consiste a vezes más en una eloqüencia muda, en un mostrar la perfección al descuido ; que el sabio dissimulo es el más plausible alarde, porque aquella misma privación pica en lo más vivo a la curiosidad. Gran destreza suya no descubrir toda la perfección de una vez, sino por brúxula irla pintando, y siempre adelantando ; que un realce sea empeño de otro mayor, y el aplauso del primero, nueva expectación de los demás. – Trad. Amelot de La Houssaie (1634-1706) : L’Homme de cour, 1684.
   
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