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« La science, dans son
besoin d’achèvement comme dans son principe, s’oppose absolument à l’opinion.
S’il lui arrive, sur un point particulier, de légitimer l’opinion, c’est
pour d’autres raisons que celles qui fondent l’opinion ; de sorte
que l’opinion a, en droit, toujours tort. L’opinion pense
mal ; elle ne pense
pas : elle traduit
des besoins en connaissances. En désignant les objets par leur utilité,
elle s’interdit de les connaître. On ne peut rien fonder sur l’opinion :
il faut d’abord la détruire. Elle est le premier obstacle à surmonter.
Il ne suffirait pas, par exemple, de la rectifier sur des points particuliers,
en maintenant, comme une sorte de morale provisoire, une connaissance
vulgaire provisoire. L’esprit scientifique nous interdit d’avoir une opinion
sur des questions que nous ne comprenons pas, sur des questions que nous
ne savons pas formuler clairement. Avant tout, il faut savoir poser des
problèmes. Et quoi qu’on dise, dans la vie scientifique, les problèmes
ne se posent pas d’eux-mêmes. C’est précisément ce sens
du problème qui donne la marque du véritable esprit scientifique.
Pour un esprit scientifique, toute connaissance est une réponse à une
question. S’il n’y a pas eu de question, il ne peut y avoir connaissance
scientifique. Rien ne va de soi. Rien n’est donné. Tout est construit. » |
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