|
« Je brûle tout, même les meubles. »
|
|
C’est le mot de
Georges Clemenceau (1841-1929), nommé président du Conseil en 1917 à un
moment critique de la Première Guerre mondiale. Comme son prédécesseur lui
recommandait d’employer quelques-uns de ses collaborateurs, il aurait répondu :
« Non, je brûle tout, même les meubles. » |
|
|
|
|
« Rêve
et mémoire. La nature volatile des rêves fait que, pour eux comme
pour l’électricité, c’est : sitôt produit, sitôt consommé ; leur
longévité au réveil dépasse à peine celle de l’image du fil incandescent
sur la rétine, quand on abaisse l’interrupteur. S’il existait une vraie
mémoire onirique, capitale serait leur fonction dans notre vie, dont ils
polariseraient l’affectivité, fixeraient d’un jour à l’autre au réveil la
tonalité dominante, comme une toute-puissante clé musicale. Mais cette mémoire
n’existe pas, sinon comme la carcasse noircie d’une pièce d’artifice mise
à feu ; les récits de rêve, dont le surréalisme commençant a beaucoup
usé, et dont Marguerite Yourcenar a donné autrefois un recueil estimable
dans Les Songes et les Sorts,
décrivent de l’extérieur une chaîne de conducteurs que le courant, d’une fantastique
instabilité dans le voltage, ne traverse plus. Le surréalisme n’a pu prendre
les rêves pour guides que parce qu’il a toujours tenu, sans le dire, la
mémoire en haute suspicion : obstacle à la disponibilité totale de
l’être, dont il souhaitait qu’à chaque instant il pût se laisser ouvrir
jusqu’au fond ; il fallait de moment en moment tout brûler, même les
meubles, surtout les meubles. » |
|