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Dernière édition MMV - Canicvla - Midi | |
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| Intérêt | ||
| À quoi a-t-on tout intérêt ? | ||||
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L’idée que tout devrait intéresser tout le monde est la loi du marché néo-libéral… |
« Mis à part
quelques dictateurs qui pensent encore que des idées isolées de toute pratique
peuvent se révéler dangereuses, le pouvoir a très bien compris qu’il n’y
a nul besoin de censurer les gens. Plus ils parlent, plus ils sont saturés
d’informations, moins ils agissent. La censure n’est pas notre problème, l’autocensure l’est bien davantage. Les gens se censurent eux-mêmes avant d’y être obligés. Nous ne parlons plus ici d’une censure politique mais d’une censure de connivence, lorsqu’un groupe a la force d’en faire taire un autre. L’autocensure est une réalité immense. Elle se nourrit de la peur, de l’attente et des réseaux. Nous sommes tellement éloignés du réel que l’immédiat s’identifie à la personne avec laquelle nous avons dîné la veille et que nous ne voudrions pas fâcher, à celle chez qui nous souhaiterions être édité… L’autocensure commence par cette réflexion : « Je ne peux pas dire cela car je ne veux pas gêner. » Le monde réel devient alors un tas de petits arrangements au nom de connivences de | pacotille. L’autocensure précède mais rend possible la censure. Ce qui paraît légitime deviendra légal, et il paraît si légitime de se taire aujourd’hui qu’il ne faudra pas s’étonner d’une accommodation légale de cette censure existante. La censure viendra si l’on persiste à l’appeler. Il existe une autre forme de censure dans nos sociétés, la censure économique. Les discours dont elle se sert ne semblent pas idéologiques mais pragmatiques. Elle bénéficie ainsi de toute la force de l’idéologie dominante qui justement n’apparaît jamais comme idéologique. La résistance à cette censure insidieuse passe par la lutte contre l’économisme. Disputer des espaces à l’économie, accepter que les productions de l’art, de la pensée, de l’écriture ou de la recherche n’intéressent pas forcément le plus grand nombre. L’impératif économique est quantitatif. L’idée que tout devrait intéresser tout le monde est la loi du marché néo-libéral. Nous revendiquons au contraire que certains livres, certaines recherches fondamentales, certaines œuvres intéressent un petit nombre de personnes. La résistance à la censure néo-libérale passe par une création qui ne se soucie pas de toucher le plus de personnes possibles. » |
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| M. Benasayag, Abécédaire de l’engagement, « Censure » ; Bayard, 2004, p. 62-63. | |
