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« Au départ, je me suis intéressé à l’asile,
à ses hauts murs, à ses espaces tout de même très effrayants qui sont
là en général à côté des prisons, au cœur ou à la limite des villes,
espaces infranchissables, espaces dans lesquels on entre, mais dont
on sort beaucoup plus rarement, et dans lesquels règne ce pouvoir sans
doute attentif, sans doute méticuleux, donc sans doute garanti par la
science, mais qui représente tout de même par rapport aux normes, aux
règles du fonctionnement social général d’extraordinaires exceptions.
J’ai donc commencé par m’intéresser à cela. Finalement, le pouvoir psychiatrique
n’est-il pas d’autant plus puissant qu’il est plus insidieux ?
C’est-à-dire au moment où vous le rencontrez ailleurs que dans son lieu
de naissance, lorsqu’il fonctionne, non pas dans son domaine normal
d’ingérence, qui est la maladie mentale, mais partout ailleurs ;
le psychiatre à l’école, qui, justement, lorsqu’un petit garçon ne réussit
pas très bien ses examens, vient fourrer son nez et dit : « Mais
qu’est-ce qui se passe là-dessous ? Quel est le drame affectif,
quel est le problème familial, quel est l’arrêt de développement psycho-physiologique,
psycho-neurologique, qui est à l’origine de cela ? » Le problème
sexuel de l’adolescent : qu’est-ce que fait la famille ? Ils
l’envoient chez le psychiatre, ou ils l’envoient chez le psychanalyste.
Un garçon commet un acte délictueux : en prison ; examen psychologique,
il passe aux assises, examen psychiatrique obligatoire, etc. »
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